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mardi 20 octobre 2009

LEGISLATIVES AU NIGER: que fera maintenant la CEDEAO


Pour une fois, on peut dire aux chefs d’Etat des pays membres de la CEDEAO, bravo ! Car, le fait n’est pas si courant, que ces dirigeants se mettent d’accord sur des sujets aussi complexes et qui concernent leur pair.


Réunis à Abuja au Nigeria où ils avaient à se pencher sur deux dossiers majeurs qui écornent franchement l’image du continent, l’un relatif à la Guinée et l’autre au Niger, ceux-ci ont, entre autres décisions, adjoint leur homologue du Niger, Mamadou Tandja, de reporter à plus tard les législatives। Des législatives qui doivent, en principe, se tenir aujourd’hui même, marquant ainsi l’entrée du Niger dans une nouvelle ère politique : celle de la VI République। Bien entendu, une chose est de taper du poing sur la table, une autre est de susciter quelque frayeur de la part de celui qu’on veut intimider। En ce qui le concerne, le pouvoir de Tandja s’est-il laissé perturber par les injonctions de la CEDEAO ? En apparence, non, si on s’en tient, du moins, à la rapide réaction de celui-ci, qui n’a été autre que de réaffirmer à la face du monde entier que les législatives se tiendront bel et bien à la date arrêtée. Au-delà de sa décision par-dessus tout courageuse, on peut en revanche se demander si la démarche de la CEDEAO a été bonne et si, finalement, elle n’a pas apporté des verges pour se faire fouetter par le régime de Tandja. De fait, la décision de l’organisation sous-régionale paraît intervenir assez tard, puisqu’elle est tombée seulement l’avant-veille de la consultation électorale que s’apprêtait à organiser le Niger. Alors, les choses sont-elles allées si loin qu’elles interdisent au pouvoir nigérien tout retour en arrière ? En tout cas, pousser le président Tandja à reculer, à l’étape où il en était, c’était comme exiger d’autrui qu’il se livre au jeu difficile du coït interrompu. A deux doigts du plaisir de voir enfin l’élection se tenir, il fallait donc, pour Tandja, que ce rêve se réalisât, et l’on voit mal comment ce dernier aurait pu bouder un tel délice ! Cela d’autant plus que l’organisation de ce scrutin viendra renforcer les assises de "sa" nouvelle république qu’il s’est évertué à bâtir.Le Niger resté donc, comme on le voit, sourd aux injonctions de la CEDEAO, que fera, à présent, l’institution qui, visiblement, peine à se faire respecter ? De quels moyens dispose-t-elle pour se faire entendre et surtout se faire obéir ? Quelle sera maintenant son attitude vis-à-vis des nouveaux élus nigériens ? Les reconnaîtra-t-elle ou, mieux, pourra-t-elle aller jusqu’à envisager des sanctions à leur encontre, telles des interdictions de voyager dans l’espace communautaire ? En tout état de cause, il apparaît clairement que cette institution joue plus que jamais sa crédibilité. Déjà, il est question d’exclure ce pays du cercle des prétendants à l’organisation de toute manifestation chapeautée par l’institution communautaire.Bien d’autres sanctions seraient en cours. Mais, à dire vrai, que vaudront-elles aux yeux du pouvoir nigérien ? Pourront-elles empêcher Mamadou Tandja et son régime de dormir ? Rien n’est moins sûr. En vérité, si l’homme qui préside aux destinées du Niger depuis bientôt une décennie, se croit en droit de s’accorder tout ce qu’il veut, c’est que très peu, parmi ses pairs de la CEDEAO et du continent africain en général, sont bien placés pour lui donner des leçons de morale. Champions des tripatouillages constitutionnels et autres avanies à la démocratie, quel tort Mamadou Tandja aurait-il à renvoyer certains de ces dirigeants à leurs choux ; à les inviter à commencer par balayer devant leur porte ? On peut, à cet effet, comprendre qu’entre chefs d’Etat africains, deux courants se dégagent parfois quand ils sont appelés à prendre de grandes décisions de gouvernance politique pour l’intérêt du continent. D’un côté, des partisans de la manière forte, qui, n’ayant aucun complexe à se faire quant à leur bonne tenue démocratique, sont d’avis qu’on remonte ici et maintenant les bretelles à tous ces dirigeants qui s’écartent si dangereusement du chemin de l’orthodoxie démocratique, au point de mettre non seulement leur nation en péril, mais plus grave, toute la sous-région. De l’autre côté, des adeptes de la méthode douce, dont certains hésiteraient à trop mettre sur la sellette un pair au risque de faire leur propre procès. Et, encore une fois, on en vient à mettre le doigt sur un chancre mou de l’Afrique, qui retarde sérieusement son développement : l’habitude qu’ont ses dirigeants à confectionner des textes, à ériger des règles qu’ils ne sont pas prêts à appliquer à eux-mêmes. Mandatée par la CEDEAO pour prendre langue avec les autorités nigériennes et obtenir de celles-ci qu’elles reviennent sur leur décision, la présidente du Liberia, Ellen Johnson Sirleaf, n’a certainement pas été désignée au hasard. Son choix revêt tout un symbole. Revenu de très loin, son pays est aujourd’hui, sur le continent, un assez bel exemple de démocratie. Une démocratie dont elle-même aura contribué à dégager la voie, en accédant au pouvoir par la voie des urnes. Ce n’est pas à elle que Mamadou Tandja pourra dire de retourner à son maigre potager démocratique pour s’occuper de ses oignons pourris !Reste que, comme on le sait, le choix de la présidente pour obtenir le report du scrutin, n’aura pas permis d’infléchir la position de Tandja. Les autorités nigériennes justifient leur refus du report du scrutin législatif par ce qu’elles qualifient de réponse à donner à une "exigence démocratique". Comme si, par ce report, il était question qu’elles ramât contre le très faible courant de la démocratie qui caractérise aujourd’hui le Niger. Une démocratie que beaucoup d’Africains, bien plus que les autorités nigériennes, souhaitent voir renforcée et consolidée."Le Pays"






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